Halal encore! Après la viande - le lait, le fromage et les crêpes se couchent devant Allah. Pitoyable.
«Je ne peux pas donner le nom du grand groupe laitier de la région Ouest qui
se lance dans les yaourts halal, je suis tenu au secret», prévient Bruno
Bernard, consultant extérieur de la Chambre de commerce de Bruxelles,
spécialiste en audit industriel pour le marché halal.
Renseignements pris, il s'agit d'une usine implantée en Ille-et-Vilaine.
Le premier nom qui ressort est celui du groupe Lactalis, basé à Laval, qui fabrique déjà des
fromages halal et qui possède des usines dans le département breton.
Lactalis ne confirme pas l'information. La certification halal est attendue dans les semaines
à venir, le lancement de la production est prévu en décembre. L'éventail des produits
bretons destinés au marché musulman pourrait s'élargir à d'autres spécialités, comme le
saumon fumé. «Et pourquoi pas les crêpes, les biscuits ou le cidre sans alcool halal?», lance
Bruno Bernard.
Le spécialiste belge est venu en février dernier à la Chambre de Commerce et d'industrie
(CCI) de Lorient pour informer les industriels bretons des potentialités du marché halal
(60millions de musulmans en Europe, 1,2milliard dans le monde).
Nouveaux horizons
«La Bretagne est l'une des grandes régions agroalimentaires européennes, commente
Bruno Bernard. Des concurrents européens se sont déjà lancés sur le vaste marché du halal,
il ne faut pas se laisser distancer». Selon l'expert belge, la Bretagne peut s'ouvrir de
nouveaux horizons commerciaux avec les produits laitiers «comme elle a su le faire avec la
volaille ou la viande bovine».
Sans gélatine de porc
En Belgique, une société laitière a lancé récemment un yaourt halal, le Sultine, qui a été
certifié par un imam. Il ne contient pas de gélatine de porc, un gélifiant souvent utilisé
dans les produits allégés. Les magasins distributeurs se sont rapidement trouvés en
rupture de stock. «Le yaourt halal explose sur les marchés belge et hollandais depuis
quelques semaines», indique Bruno Bernard. Sultine vise aussi l'export.
Une forte demande
Propos confirmés par Abderrahman Bouzid, directeur de la société AB Assosiates Conseil
et ancien responsable des produits halal chez Casino. «La demande en produits laitiers
sans additif d'origine animale (présure, gélatine) est forte en Europe, en Asie et en Afrique
du Nord, explique-t-il. La France possède les outils de production, elle peut devenir leader
sur ce marché et créer des emplois, la Bretagne se prive d'un débouché important». Bruno
Bernard a d'autres contacts avec des industriels bretons, notamment une entreprise de
saumon fumé. «Je leur explique que les contraintes techniques sont minimes, c'est bien
moins compliqué qu'avec l'abattage des viandes». La démarche de certification est simple:
un expert réalise un audit industriel, un imam vient sur place pour vérifier que le procédé
de fabrication est aux normes. «Il n'est pas question de prière dans l'usine, comme on
l'entend souvent», précise Bruno Bertrand.
Yves Drévillon